Jean-Philippe Buzaud

Les clowns sont de vrais couteaux suisses ; ils peuvent jouer tous les sentiments !

Il est l’un des 3 compères des Mangeurs de lapin. De retour sur la piste du Cirque d’Hiver, Jean-Philippe Buzaud, dit Jean-Phi, est aussi à l’affiche de « Sur un fil *», long métrage signé Reda Kateb. Un premier rôle au cinéma pour l’acteur et clown qui fait écho à son engagement au Rire médecin depuis plus de trente ans !

De vous, Sigrid La Chapelle dit : « Jean-Phi, c’est un VRAI acteur ».

Sans doute parce que, de nous trois, c’est moi qui ai le plus d’expérience dans le jeu d’acteur. J’ai fait beaucoup de théâtre sous la direction de nombreux metteurs en scène, et ce, pendant 25 ans, notamment à La Jacquerie même si, en parallèle, j’ai toujours été clown. Cela m’amène à participer à tout ce travail d’horloger sur le timing, le rythme. C’est vraiment une partition qu’il faut respecter. C’est très écrit et ça fonctionne comme un domino : vous enlevez quelque chose et le reste ne pourra pas tomber. Dès qu’on sort de la piste, on revoit notre mécanique pour, au besoin, revisser. Tout est réglé au millimètre près. S’il n’y a pas de place pour l’improvisation dans cette organisation quasi-militaire, on s’accorde des petits moments -courts- avec le public pour jouer aussi avec lui !

À chacun son rôle !

Dominic est davantage dans le gag, Sigrid, dans la mise en scène, la déco, la création des costumes et la gestion de la compagnie… Mais l’écriture et la mise en scène se font toujours à trois et toute décision artistique se prend obligatoirement en trio. Les Mangeurs de lapin, c’est une véritable aventure collective.

Vous aimez mixer les univers !

Oui, on fait un mélange du monde du théâtre, du cirque et du music-hall dont on est issus tous les trois. C’est une richesse et on se complète à merveille. Les clowns sont de vrais couteaux suisses ; ils peuvent tout jouer. On met beaucoup d’émotions dans nos personnages : les relations conflictuelles entre eux, la peur, la honte, la douleur…

Vous débutez au cinéma et pas avec un rôle de composition ! Ça parle de quoi ?

Sur un fil raconte l’histoire de Jo, une artiste de cirque de rue qui découvre le travail des clowns professionnels de Nez pour rire auprès des enfants malades. Tout a commencé avec Sara Giraudeau qui a tourné un doc sur le Rire médecin pour Arte. Reda Kateb tombe sur son film. Un jour, son producteur lui dit « Lis ça ! » en lui tendant Journal du docteur Girafe, le livre de Caroline Simonds, la fondatrice du Rire médecin. C’est le déclic. Il me contacte et me dit « T’aimerais faire du cinéma ? » J’ai fait tout ou presque, artistiquement parlant, sauf tourner dans un film !

Vous étiez en confiance, en connexion, avec le metteur en scène, l’univers des enfants hospitalisés…

Lui-même, parrain de l’association Le Rire médecin, a connu dans sa jeunesse des expériences de clown pour des anniversaires et lors de manifestations et autres salons. La maman de Reda était infirmière et il l’a beaucoup observée dans son métier de soignante.

Cela fait 31 ans que j’appartiens à cette association et que mon personnage Roger Chips intervient à l’hôpital. Grâce à son art, un clown peut ramener les petits malades vers la lumière, vers la vie. Se rendre à l’hôpital et aller exécuter ses numéros sur la piste en parallèle constitue un bon équilibre. On peut voir concrètement ce que l’on apporte aux autres. Et, vous savez, le divertissement n’est pas un gros mot. On sait pas ou peu comment les clowns travaillent. Grâce à Reda, le film va contribuer à comprendre notre approche et ce travail de l’intérieur…

Vous êtes un vrai passionné de cirque et un grand collectionneur, paraît-il !

Oui, je possède pas mal d’objets en lien avec les Fratellini, notamment, mais quand j’ai visité le musée de Louis-Sampion Bouglione, là, j’ai vécu un rêve. D’ailleurs, j’ai dévalisé la boutique du Cirque d’Hiver. J’ai même eu droit à un cadre avec le titre du Meilleur Client 2023, c’est dire !

* sortie en salles le 30 octobre 2024